Sélection des sources

Les recherches bibliographiques que l’on effectue à l’entame de son travail en vue d’établir la liste des sources à consulter ou la synthèse bibliographique débouchent souvent sur une masse importante de références, surtout depuis l’avènement d’Internet et la mise en ligne des catalogues de bibliothèques et d’éditeurs, qui dispensent désormais du fastidieux travail de dépouillement des répertoires bibliographiques, frappés d’obsolescence. Une sélection s’impose invariablement au sein de la masse d’informations collectées.

Le principal critère de sélection des sources collectées est leur fiabilité. Mais, selon le type de travail, selon la discipline, d’autres critères peuvent s’imposer.

À titre illustratif, on développera ici l’exemple des lettres françaises du Moyen Âge, pour l’étude desquelles il existe certains types de support à écarter en toutes circonstances et d’autres à privilégier.

Les textes médiévaux français sont en effet à aborder avec d’infinies précautions. Conservés dans des manuscrits très anciens parfois difficilement manipulables, ces textes ont fait l’objet de transcriptions par des philologues. C’est sur ces transcriptions des textes que travaillent le plus souvent historiens et philologues, d’une part parce que les manuscrits anciens sont difficilement accessibles et d’autre part parce qu’il s’agit de protéger les manuscrits originaux de toute cause de dégradation (altération des encres à la lumière, fragilité des supports ou des reliures, …)

Or, nous n’avons acquis que récemment une connaissance suffisante (quoique toujours fragmentaire) de la langue française du Moyen Âge. Par ailleurs, la transcription des manuscrits, en d’autres termes l’art de l’édition critique, n’a été codifiée qu’au XXe siècle. Longtemps privés d’une connaissance suffisante de la langue qu’ils transcrivaient et d’une méthode stricte, critique, d’établissement du texte, les philologues et les historiens ont souvent pris des libertés avec les textes anciens qu’ils éditaient, attribuant notamment à certains textes des titres non voulus par leurs auteurs :

Titre des œuvres médiévales
Un exemple célèbre est celui de Clément Marot, renommant les œuvres de François Villon : Ballade des pendus, Ballade des dames du temps jadis… C’est sous ces titres que les œuvres de Villon sont connues désormais… mais ces titres ne doivent rien à Villon.

ou, plus grave, « retravaillant » certains passages, pour des motifs tantôt philologiques (passages linguistiquement obscurs), tantôt esthétiques. Les textes médiévaux ainsi manipulés cessent d’être des témoins fiables, aussi bien d’un point de vue linguistique que d’un point de vue littéraire ou historique.

La majorité des textes médiévaux ont toutefois fait l’objet d’éditions et de rééditions récentes, par des éditeurs scientifiques possédant une meilleure connaissance de la langue ancienne et respectant une même méthode d’édition critique. Lorsque le choix se présente, on préférera ces éditions critiques récentes.

Remarque
La collection des « Classiques Français du Moyen Âge », publiée chez Champion (Paris), celle des « Textes Littéraires Français », publiée chez Droz (Genève) ainsi que les publications de la Société des Anciens Textes Français sont généralement considérées comme fiables.

Une semblable prudence est à adopter quel que soit le texte concerné. Les textes modernes, voire contemporains, font eux aussi l’objet d’éditions de qualité variable. Lorsqu’il existe une édition critique, on la préférera à une édition de vulgarisation, même pour les textes les plus récents.

Remarque
Dans ce cas-ci, on retiendra que la collection « Pléiade » est réputée pour la qualité scientifique de ses éditions critiques. Par ailleurs la collection « Textes Littéraires Français » de Droz inclut des textes débordant largement le Moyen Âge (ceux de Diderot, par exemple), d’une égale valeur philologique.

Mais non, vous ne vous êtes pas perdu !